Kirghizistan

     

          Quelle chance! Telle est ma première pensée en mettant le nez dehors, ce matin. Dès notre arrivée à Bichkek, tous les voyageurs rencontrés nous ont prévenus. Le Song-Kol c'est magnifique! Seul bémol, à cette altitude le beau temps n'est pas toujours au rendez-vous. Attendez vous à l'avoir le matin jusqu'à midi et...l'après midi ça se gâte. Eux, ont souvent du, rester l'après midi sous la guitoune, avant de voir la pluie se calmer en soirée.
          J'ai beau scruter le ciel au plus loin, pas un nuage ne vient maculer le ciel bleu. La météo sera-t-elle avec nous?

     

          Avant d'attaquer le col, nous longeons une dizaine de kilomètres une piste en bonne état.

     

          Deux types de paysage se font face. A gauche, la rivière Tolok apporte cette touche de verdure rendant l'espace plus vivant.
A notre droite, c'est l'aridité qui domine, le bleu du ciel unissant ces deux univers.

     

          En fond de vallée, telle une sentinelle, un âne vient nous saluer. Les premiers lacets du col de Kalmak-Ashuu se présentent sous nos roues.

    

          Quel bonheur d'évoluer dans cet univers! La lenteur de notre progression permet de sentir le monde qui nous entoure.
J'observe une marmotte qui semble jouer à cache-cache. Dommage que mon objectif ne soit pas assez performant...

     

          Nous enfilons les lacets les uns après les autres. J'essaie d'imaginer ce qu'étaient nos cols alpestres et Pyrénéens au début du 20 ème siècle, quand ceux ci n'étaient pas encore asphaltés.
          Au détour d'une courbe, je discerne une volute de fumée sortant d'un tuyau de poêle fixé sur une carcasse de bus. Drôle de véhicule! Sans doute une réplique de nos campings- car occidentaux?
           Je décide de m'approcher, espérant une sympathique rencontre.

     

          Personne ne semble se soucier de notre présence. Pourtant, j'insiste en hélant une éventuelle personne. Celle-ci se présente sous les traits d'une jeune femme et d'un jeune garçon. Je quémande une tasse de thé. Aussitôt, les deux jeunes gens, frère et soeur, dresse une table où viennent se caler, pain, beurre, miel et confitures. Nous n'en demandions pas tant, mais telle est l'hospitalité de ces semi-nomades. Durant les quatre mois d'été, ils vivent ici, laissant pâturer leurs animaux. L'hiver, ils redescendent dans les vallées où ils sont généralement scolarisés.
          Avant de nous quitter, ils nous offrent le traditionnel "koumis". Le koumys, (de multiples orthographes et appellations avoisinantes existent selon les langues) ou aïrag, est une boisson fermentée à base de lait de jument ou d'ânesse. Cela ressemble un peu au petit lait d'une faisselle aigre et un peu piquante.
          La consommation de laits fermentés et de koumys était déjà courante dans l'antiquité, elle remonte à l'époque de la domestication des animaux. Le koumys proviendrait d'Eurasie, chez les Buschirs, les Tartares, les Kirghizes, les Kalmoucks, particulièrement amateurs de lait de jument fermenté. Les laits fermentés plus faciles à conserver que le lait, sont en quelque sort les ancêtres de nos yaourts et laitages modernes.
          Je n'ai pas rencontré de véritable amateur de cette boisson parmi les occidentaux vu sur notre chemin. Marine, ne tentera pas l'expérience plus loin que d'y tremper les lèvres. J'ai donc droit à une double ration, histoire de ne pas froisser nos hôtes...
              

          Poussant ou chevauchant nos montures, nous poursuivons notre ascension. Au delà de 3000 mètres, les effets de l'altitude commencent à se faire sentir. Marine, semble mieux s'accommoder de cette raréfaction de l'oxygène. Vers 3200 m nous croisons un groupe de cyclos, composé d'un Canadien, d'un Israélien et de deux Suisses. Leurs encouragements nous galvanisent.

          

          Plus que quelques lacets et le sommet à plus de 3400 mètres apparait. Pour nous accueillir, notre premier troupeau de yacks, apparemment habitués à regarder passer les cyclistes.

          

     

          Après plusieurs heures d'ascension, nous savourons cet instant. Gagné par une certaine émotion, nous pouvons nous laisser glisser vers le lac Song-Kol. Une dizaine de kilomètres de descente en pente douce, nous ramène à une altitude de 3016 mètres.    

 

MAGIQUE!

     

          Le lac Song-Kol se classe parmi les plus beaux sites du Kirghizistan. Tout autour, les bergers et leur famille, passent les mois d'été sur les pâturages entourant le lac. Logeant sous les traditionnelles yourtes, ils vivent ainsi au rythme de leur troupeau.

     

          La yourte est une demeure traditionnelle des peuples nomades de l’Asie Centrale, y compris les Kirghiz. On peut trouver des yourtes de l’Anatolie en Turquie jusqu' à la Mongolie.
          Sans doute tourné de plus en plus vers les villes, les kirghiz accordent cependant une place importante à leur mode de vie et la yourte reste un lien solide et durable avec le passé.

                    

          L'été, environ 1000 personnes vivent ainsi autour du lac Song-Kol pour environ 300 yourtes.

              

          En été, ses rives servent de pâturage à plus de 3000 chevaux, 3000 bovins et 40 000 ovins.

 

         

          Nous passons un bon moment de l'après midi, chez cette famille de bergers Kirghiz. Déjà, notre très jeune hôte sait recevoir en nous proposant du "Koumis" stocké dans un tonneau en bois.
          Il est surprenant de constater comment les jeunes enfants sont agressés par les rayons du soleil. Sans protection particulière, ils subissent les outrages de l'astre solaire, particulièrement néfaste à cette altitude.

          

          Force est de constater, que cette vie loin du confort urbain, n'est pas de tout repos. Le chef de famille semble en tous cas particulièrement affairé. Il n'arrête pas! Et les vacances c'est pour quand?

             

          Le lac Song-Kol situé dans le massif des Tian Shan est d'une surface de 275 km2, et d'une profondeur de 15 mètres. Il forme la plus grande réserve naturelle d'eau douce du Kirghizstan. La longueur de ses rives dépasse 90 km.
Situé dans une cuvette aux pentes douces, de 60 km de long et 30 km de large, entourée de crêtes montagneuses, dont les plus hauts sommets dépassent 4000 m, il reste glacé et couvert de neige 150 jours par an.

Le lac n'est accessible que par des cols à plus de 3100 m, ouverts de juin à septembre.

          L'économie du Song-Kol repose sur l'élevage d'été : production de viande, de laine, de lait de vache et de jument. Le lac produit également 100 tonnes de poisson par an.

           

          Après avoir longé plus de deux heures la rive sud du lac, nous faisons halte près d'un campement de yourtes.
Ce soir, sous notre abri de toile, nous multiplions les couches de vêtement. La nuit risque d'être fraîche...