

Suite à mon erreur de parcours de la veille j'ai du revoir l'itinéraire d'aujourd'hui. Tout d'abord, il me faut contourner la ville de Ploiesti dès le dixième kilomètre.
Ma destination finale pour cette étape Giurgiu, ville de 72000 habitants, est située à la frontière avec la Bulgarie.
Entre Ploiesti et Giurgiu, Bucarest, décrit comme le Paris des Balkans est la capitale de la Roumanie et aussi le principal centre économique du pays avec ses 2 351 000 Habitants ce qui représente prés de 10% de la population du pays.
Une ville à la recherche de son passé mais tournée vers un avenir européen comme le dépeint les catalogues de voyage.
Mon objectif premier c'est d'éviter d'entrer dans cette grande ville, faute de temps pour la découvrir tranquillement.
Je la contournerais donc par la droite.
En même temps que le soleil, la santé est revenue.
Fini le temps où ces jours derniers j'observais et m'imprégnais de la ruralité du pays.

Dorénavant, je dois cohabiter avec des poids lourds de taille. Arrivé par l'A1 du côté de Buftea située au nord de la capitale je la contourne par l'ouest: Dragomesti, Domnesti, Clincent.

La banlieue de Bucarest déroule ses plaies. J'avise des camps de roms vivants dans des conditions déplorables.

Les décharges publiques à ciel ouvert laissent leurs empreintes nauséabondes.
Si le centre de Bucarest ne doit pas manquer d'attrait, il n'en est pas de même
de sa périphérie. Tous les trafics sont bons ici pour faire de l'argent. Ainsi, je ne m'étonne pas de voir ces dizaines de nécessiteux proposer aux chauffeurs, cigarettes, montres, vêtements de contrebande, et même caméscopes nippons dernier cri.

Sur près de quinze kilomètres, pare-choc contre pare-choc les camions avancent à la vitesse d'une tortue atteint de rhumatisme. Tous les trafics sont permis ici.
Je progresse en roulant sur la bande d'arrêt d'urgence non bitumée, au risque de percer un pneu avec la ferraille éparpillée de toutes parts. Tout ce que je vois comme paysage pendant plus d'une heure c'est une file ininterrompue de mastodontes bruyants et polluants.
Enfin du côté de Jivala, je savoure un calme relatif.

Chaque ville et village possède une église un monastère, un lieu de culte parfaitement rénové. Les fresques de couleurs vives sont les témoins d'un patrimoine religieux dans le seul pays de langue latine où la confession orthodoxe est largement majoritaire.

Désormais, par la route n°5 direction plein sud, la frontière bulgare n'est plus très loin.
Si dans ma tête j'ai déjà cette nouvelle destination, ce n'est pas que je sois pressé de quitter la Roumanie. J'ai trop apprécié ce pays pour l'écrire. Seulement, plutôt que de passer la nuit côté roumain pourquoi ne pas le passer côté bulgare. Ca m'éviterait de faire du change car je suis à sec de lei.

De
Crucea de Piatra à Giurgiu une longue ligne droite de près de trente kilomètres m'offre l'occasion de faire quelques photos et surtout d'anticiper la suite de l'étape.

Ma décision est prise, ce soir je dormirais de l'autre côté de la frontière.
Les dernières images que me renvoie ce pays que j'ai tant apprécié ne sont pas des plus reluisantes.

Les barres d'HLM style communiste ne m'incitent guère à vouloir m'éterniser dans le coin.

Les gros nuages noirs qui s'amoncellent ajoutent une ambiance lugubre à cet environnement dépaysant.

Le pont de l'amitié entre Giurgiu en Roumanie et Ruse en Bulgarie marque la transition entre ces deux pays. Achevé en 1954 d'une longueur totale de 1058 mètres cet ouvrage qui traverse le Danube est à deux niveaux, un servant pour le trafic routier et un autre pour le rail.

Au premier poste douanier pour quitter la Roumanie, je rencontre trois jeunes français de la région du Doubs.
Ils m'affirment en coeur que je n'amuse pas le terrain. En effet ils m'apprennent qu'ils m'ont aperçu pour la première fois dans les embouteillages à la sortie de Bucarest. Depuis s'ils ont filé directement vers ce poste frontière, ils sont bloqués depuis car l'un deux possèdent un passeport périmé depuis quelques jours. En outre ils ont déjà du payer une taxe pour défaut de vignette. Je leur souhaite bonne chance et file à mon tour vers le préposé aux sorties du territoire. "Go, go" vocifère t-il en me faisant signe de passer.
Seconde barrière passée sans problème et me voilà en Bulgarie. De ce côté aussi les douaniers sont cool avec moi, un peu trop même, ne jetant même pas un coup d'oeil au passeport que je leur présente.
Dernier obstacle sous la forme d'un bassin de désinfection à passer et me voilà dans un nouveau pays.

La Bulgarie en signe d'hospitalité m'offre un arrosage de première classe.

Je suis un peu perdu dans cette ville d'autant plus que toutes les indications sont en langue cyrillique.
Avec une population de 178.000 habitants, Pyse, nom de la ville de Ruse mais écrite en cyrillique est la cinquième plus importante ville de Bulgarie.
Ce pays fait figure de terre inconnue, longtemps isolée derrière le rideau de fer, elle s'ouvre peu à peu à l'Occident et devrait rejoindre l'Union Européenne en 2007.
La ville ne respire pas la gaieté et la joie de vivre.

A cause de la pluie il ne me reste plus qu'à trouver rapidement un hôtel. Pas facile!
"Xotel", Enfin en voici un, je n'hésite pas je m'y engouffre. Dans le hall deux ou trois filles légèrement vêtues papotent. La réceptionniste pas plus vêtue avec un short ultra court et un body très sexy me confirme qu'elle a une chambre de libre. Sauvé des eaux!
Enfin je viens de comprendre que je suis tombé dans un hôtel où les filles exercent le plus vieux métiers du monde.
Enfin je ne serais pas plus dérangé que ça. Mais quel accueil de la part de ce pays!
Après m'être changé, douché je sors dans le centre ville pour acheter une carte routière du pays en cyrillique. Ca m'aidera pour traverser le pays.
Si la pluie avait cessée le temps de mon installation à l'hôtel, elle s'est mise à redoubler de violence.
Seule solution me mettre à l'abri dans un petit restaurant. Je commande un plat sans savoir exactement ce que je vais manger. La serveuse pas très patiente renonçant à vouloir m'expliquer. Heureusement celui-ci, une sorte de ratatouille avec du riz blanc, s'avère succulent et copieux. Ne voulant pas demander à l'acariâtre serveuse la suite du dîner, j'avise une de ses collègue. Celle-ci très sympathique me sert un dessert double ration.
En regardant la pluie tombée, les paroles d'une chanson me viennent
en tête.
Toute la pluie tombe sur moi
Et comme pour quelqu'un dont les souliers
Sont trop étroits,
Tout va de guingois
Toute la pluie tombe sur moi
De tous les toits
A chaque instant, je me demande vraiment
Ce qui m'arrive et ce que j'ai fait au Bon Dieu
Mais je me dis qu'au fond
J'en ai reçu bien d'autres dans ma vie
Que je m'en suis toujours sorti avec le sourire
Toute la pluie tombe sur moi
Oui mais... moi je fais comme si je ne la sentais pas
Je ne bronche pas, car
J'ai le moral et je me dis qu'après la pluie...
Vient le beau temps et moi j'ai tout mon temps.
Seul le sourire de la serveuse illumine quelque peu une atmosphère que je perçois comme étant un peu étrange. A l'image de leur ville, les gens sont tristes.

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